Contexte
C’est bon ! Nous l’avons fait ! La startup Hygia, dont les développements sont réalisés sur le Centre De Service de Alliance4U, est certifiée ISO 13485:2016 !
Dans toute jeune startup du monde de la santé, l’idée initiale a beau vendre du rêve, elle se fait rapidement rattraper par les certifications et autres labellisations. Souvent vues comme des freins, les normes apportent pourtant un cadre pour la sécurité et la fiabilité des dispositifs conçus.
Hygia est passée par ce chemin tortueux et complexe. Avec l’accompagnement de Alliance4U, Hygia a monté et certifié son Système de Management de la Qualité (SMQ). Cet article a donc pour objectif de partager notre expérience et quelques conseils que nous aurions aimé avoir avant de lancer cette démarche !
Voici donc, sans plus attendre, nos 15 conseils pour gérer votre démarche qualité !
Phase de démarrage
#1 / Faites vous accompagner !
Soit vous venez du monde de la qualité, soit vous engagez quelqu’un du métier pour avancer sur le sujet. Si vous n’avez aucune connaissance réglementaire, ne réfléchissez pas et faites-vous accompagner. Après deux formations, nous avons rapidement compris que cela ne suffirait pas. Ne dépensez pas votre argent bêtement et trouvez rapidement un expert pour vous coacher. Il est primordial d’avoir quelqu’un sur qui vous reposer, quelqu’un à appeler pour vous débloquer au jour le jour et avec qui prendre sereinement vos décisions.
#2 / Prenez le temps de comprendre l’écosystème
Le monde des normes est GRAND. Hygia est un éditeur logiciel dans le monde de la santé. La norme qui se rapproche le plus de son activité est la norme ISO 62304 sur les dispositifs médicaux. Mais il est recommandé d’être certifié ISO 13485 sur le Système de Management de la Qualité qui est une base essentielle pour la 62304. Les renvois entre normes sont ainsi nombreux. On se retrouve dans un plat de spaghettis qu’il faut démêler et comprendre avant de se lancer. Prenez le temps de faire cette cartographie pour tracer votre chemin vers la certification.
Entre normes, c’est déjà compliqué, mais au sein d’une norme, cela l’est tout autant ! Dans chacune, on retrouve des éléments génériques applicables pour tous les cas d’usages, mais il existe aussi des éléments très spécifiques qui ne vous concernent pas forcément. Par exemple, les exigences relatives à la validation des procédés de stérilisation ne sont pas applicables dans le monde de l’édition logicielle. Il faut savoir faire la part des choses. Dans cet exemple, c’est flagrant, mais parfois, c’est beaucoup plus subtil !
#3 / Cherchez un organisme notifié au plus tôt
Le contexte réglementaire est complexe. Le règlement européen initialement prévu pour mai 2020, avec pour objectif d’harmoniser les pratiques sur les dispositifs médicaux au sein de l’Union européenne, a finalement été repoussé d’un an. Les organismes notifiés sont enfin notifiés, mais ce n’était pas le cas lorsque nous avons lancé notre démarche qualité. Il nous a fallu plusieurs mois pour trouver l’organisme avec lequel travailler.
Le conseil est donc simple, cherchez votre organisme notifié au plus tôt. Un des avantages avec le règlement européen, c’est que, comme son nom l’indique, vous pouvez prendre un organisme européen. Une fois que votre objectif en matière de certification est clair, contactez-les et définissez une date d’audit au plus vite ! Cela donne aussi un objectif, une deadline, ce qui est important pour vous organiser au mieux.
#4 / Lisez les normes !
Cela peut paraître étrange comme conseil, mais vous verrez qu’il est facile de ne pas avoir envie de se plonger dans un document de 300 pages d’exigences et de contraintes, avec des renvois dans chaque paragraphe, et des termes qui prêtent à confusion toutes les deux lignes… Mais il faut se motiver et prendre le temps de lire les normes et les faire lire à ceux qui vont participer à la démarche. Car, même si l’on est accompagné, ce n’est pas au coach de connaître les textes. Il faut se les approprier et les comprendre pour les appliquer au mieux.
#5 / Montez un glossaire et partagez le
En lien avec le précédent conseil, les mots comptent ! Dans la norme, on retrouve beaucoup de mots spécifiques, avec un sens différent de la réalité du terrain. Il faut s’assurer que les mots soient clairs et bien compris. Il est facile de confondre deux termes, ce qui peut mener à des quiproquos lors de l’audit. Montez votre glossaire pour clarifier et partager la compréhension des textes.
Vous pouvez notamment y faire apparaître les correspondances avec les méthodes déjà en place dans votre organisation. Par exemple, Hygia est basée sur une méthodologie agile. Nous avions déjà des enregistrements et des éléments de méthodes que nous avons mis en lien avec les exigences de la norme. Le mieux reste tout de même de coller aux termes de la norme pour éviter toute erreur et esquiver des débats inutiles avec l’organisme notifié pendant les audits.
#6 / Choisissez le bon outil
Vous pouvez décider de documenter votre système qualité sous Word et Powerpoint, ou même de tout tracer au format papier. Mais à moins d’être fou ou masochiste, nous vous conseillons de rapidement choisir un outil adapté et de vous y tenir.
La qualité va vous faire générer deux types de documents. Tout d’abord, les documents qui vont évoluer dans le temps comme vos Procédures ou vos Work Instructions. Ces documents ont besoin d’une traçabilité précise et d’une gestion de versions, avec un mécanisme de validation. Ensuite, vous avez les Enregistrements qui apportent les preuves que vous déroulez bien vos procédures. Ces derniers peuvent être versionnés, mais une fois validés, ils ne bougent plus.
Chez Hygia, après plusieurs essais, nous avons fait le choix de la suite Atlassian. L’outil permet notamment de faire le lien entre l’équipe de développement (Jira) et la documentation fonctionnelle et réglementaire (Confluence). Avec des plugins comme Comala pour la signature et les flow de validation, ou encore TM4J pour les campagnes de tests, la suite devient intéressante.
Ce qu’il faut retenir, c’est qu’il n’y a pas d’outil magique, mais qu’il est souhaitable d’en choisir un qui va vous aider à automatiser les preuves et la traçabilité.
Construire son système qualité
#7 / Ne travaillez pas seul et impliquez toute l’équipe
Si vous êtes l’heureux élu, désigné comme responsable qualité, avec pour objectif d’obtenir le Graal grâce à vos petites mains et votre grain de motivation, nous n’avons qu’un conseil : ne le faites pas seul.
Une démarche qualité va impacter toute l’organisation, de la stratégie à la production en passant par les activités supports. Vous allez devoir documenter chaque procédé et faire en sorte d’y intégrer les exigences des normes. Qui de mieux pour décrire l’activité que les acteurs eux-mêmes ? Organisez des brainstorms avec l’équipe pour décrire les processus. Faites leur écrire les procédures. Ce sont eux les responsables de leurs activités.
De plus, si vous vendez bien la nécessité et les bienfaits de la norme, intégrer les acteurs à la démarche qualité ne fera que favoriser l’acceptation du changement qu’elle peut engendrer.
#8 / Utilisez un board visuel
Une des premières étapes de la démarche qualité, c’est de créer sa cartographie de processus. Lors de cette étape, c’est important d’y voir clair. Il faut s’assurer que tous les processus s’accordent bien, qu’il n’y a pas de trou dans la raquette. Il faut que les entrées et sorties soient en lien et que l’ensemble soit homogène et compréhensible. Dans ce premier temps, nous vous conseillons de travailler avec un format palpable, et non numérique. Si le format est imposant, il peut aussi servir à la sensibilisation de l’équipe.
Lors de cette étape, chez Hygia, nous avons emprunté des idées à l’agilité ! Nous avons commencé par découper un carton de 2 sur 5 mètres sur lequel nous avons posé notre cartographie. Nous avons dessiné, collé, crayonné, épinglé, effacé, ajusté, ajouté tout ce dont nous avions besoin dans notre Système de Management de la Qualité. Ce guide nous aura suivi jusqu’au jour de l’audit.
#9 / Keep it simple !
Quand on est plongé dans la complexité des normes pendant des mois et des mois, il est facile de créer des solutions compliquées pour répondre à des problématiques simples.
Prenez l’habitude de faire relire vos documents par quelqu’un de l’équipe, ou même quelqu’un d’externe pour un avis neutre. S’il ne comprend pas, ou s’il pose trop de questions, simplifiez ! Cela permet aussi de se rendre compte des absurdités ou des erreurs (oui, vous allez en faire). Si une procédure n’est pas claire pour l’équipe, elle ne le sera pas non plus pour l’auditeur et de toute manière, elle ne sera pas appliquée.
#10 / Respectez au maximum la norme
Mettons-nous en situation ! Avant un audit, l’auditeur vous enverra son plan d’audit. Il vient auditer la structure pour s’assurer que vous répondez aux exigences de la norme. Vous retrouverez donc dans son plan les chapitres de la norme qu’il souhaite investiguer au cours de l’audit. Votre objectif est clair : savoir répondre à chaque chapitre, chaque phrase, chaque exigence.
Le plus simple pour cela est donc de monter son organisation au plus proche de la norme. Autant que possible, nous vous conseillons d’utiliser les mêmes termes, le même découpage dans vos procédures, générer les mêmes enregistrements.
Chez Hygia, nous avions déjà une méthodologie en place et nous souhaitions vraiment garder notre culture agile pour nous adapter rapidement aux nouveaux besoins et à la réalité du terrain. Nous avons donc monté un document qui pour chaque chapitre de la norme décrit notre manière de répondre aux exigences et les preuves générées !
Pendant l’audit
#11 / Faites participer les responsables de processus
Dans les petites structures, une seule personne sera nommé responsable qualité et aura beaucoup de poids sur ses épaules. Mais pendant l’audit, ne restez pas seul !
Un audit, c’est long et vous ne tiendrez pas en étant seul. Pendant 3 jours, vous allez répondre aux questions de l’auditeur. C’est du sport ! Vous connaissez le plan de l’audit, prévoyez à l’avance l’organisation et passer le relai. Demandez à chaque responsable de traitement de bloquer des créneaux dans leur agenda. Ils doivent être présents pour répondre aux questions de l’auditeur sur les parties les concernant.
#12 / Ne donnez que l’essentiel à l’auditeur
Pendant l’audit, le rôle de l’auditeur est de gratter pour voir si ce n’est pas que du vernis. Il tire sur ce qu’on lui donne et va chercher la petite bête. Après des mois de souffrance à monter des procédures, générer des enregistrements, on a qu’une envie c’est de montrer tout ce qu’on a mis en place et sait faire. NON ! Evitons au maximum de lui tendre le bâton pour se faire battre. Il vous faut répondre clairement et simplement à ses attentes et, si possible, en garder sous la pédale. Cela va rassurer l’auditeur sur votre compréhension et le respect de la norme.
#13 — Écoutez et notez les conseils de l’auditeur.
Il vous faut accepter que malgré son rôle de “flic” de la qualité, l’auditeur n’est pas dans la démarche de vous “casser”. Il cherche à comprendre votre organisation, votre fonctionnement, pour vérifier que vous respectez la norme. Les auditeurs ne sont pas censés faire du coaching, mais si on montre que l’on maitrise le sujet, que l’on est au clair avec la norme, ils sauront donner des conseils pour vous aider à vous améliorer.
Un audit, c’est long. Dans notre cas, 8 heures par jour, pendant 3 jours. Il y a beaucoup de contenu et il est important de noter les points clés et les actions à mettre en œuvre pour améliorer votre système qualité. Même en dehors des non-conformités et de l’Action Plan, qui sont les documents officiels, notez vous les actions à mettre en œuvre pour le prochain audit !
Après l’audit
#14 — Après l’audit, reposez-vous
C’est bon ! L’audit est terminé ! Certains préféreront profiter de la fraîcheur de l’information pour documenter et lancer les actions suite à l’audit, mais notre conseil est plutôt de vous reposer. Un audit, c’est éprouvant. Posez un week-end de 4 jours, prenez du temps pour vous ! Vos notes peuvent attendre quelques jours ! 😉
Un système qualité, ça se met en place, mais surtout : ça se maintient. Juste après l’audit, vous aurez à écrire votre Action Plan et la gestion des non conformités. Mais ensuite ? Il vous faudra faire vivre vos procédures, faire évoluer votre système pour qu’il réponde aux nouvelles pratiques de l’équipe, s’assurer que tout tourne rond. Et ça, c’est aussi du boulot ! Donc prenez le temps de vous reposer.
#15 — Encadrez la certification
C’est bon, vous êtes certifié ! Vous avez obtenu votre Graal ! C’est un joli trophée, vous pouvez être fiers de vous !
En interne, il faut que vous fêtiez la nouvelle ! Encadrez le certificat et affichez-le dans vos locaux, organisez un petit goûter pour marquer le coup !
Concernant l’externe, parlez-en, communiquez-le, mettez le en avant sur votre site web. Faites attention à bien respecter les règles, on ne communique pas comme on le souhaite une norme ISO. Demandez le badge à votre organisme notifié et rajoutez le dans vos documents officiels. Vous pouvez même faire un petit message dans votre newsletters, à vos clients ou prospects. Faites-vous mousser, vous l’avez bien mérité ! 😉
Conclusion
La qualité, c’est un gros sujet. On aurait pu en parler pendant des heures, mais on a décidé de se limiter à ces 15 conseils (c’est déjà bien assez long) ! N’hésitez pas à nous raconter votre expérience ! Et si l’article vous a plu, partagez-le à vos collègues dans la qualité !